Reconnaitre et interpréter les expressions faciales de son cheval

Expressions faciales

La compréhension des émotions et du bien-être des chevaux est essentielle pour assurer une relation harmonieuse entre l’animal et son propriétaire. Les expressions faciales du cheval, notamment celles liées à la douleur, au stress ou au plaisir, sont des indicateurs cruciaux que tout passionné de chevaux devrait savoir identifier. Cependant, un manque de formation et de connaissances sur ces signaux peut entraîner des malentendus et des conséquences négatives pour le cheval. De plus, l’interprétation correcte de ces comportements varie grandement selon l’expérience et l’approche du propriétaire. Explorons ensemble, l’importance de reconnaître ces signes, les défis que rencontrent les cavaliers dans cette tâche et les solutions potentielles comme l’utilisation de l’intelligence artificielle pour améliorer la détection des émotions des chevaux. En apprenant à mieux comprendre leur comportement, il devient possible d’adapter l’éducation et les soins aux besoins spécifiques de chaque cheval.

L’article étant assez long, je vous encourage à le parcourir dans son ensemble. Cela dit, si un sujet en particulier vous intéresse, vous pouvez cliquer sur le titre ci-dessous pour accéder directement à la partie concernée.

  1. Les signes que vous envoie votre cheval
  2. L’intelligence artificielle
  3. La résignation acquise
  4. Le pansage : un moment important pour votre cheval

Les signes que vous envoie votre cheval

La face du cheval est une grande source d’informations. L’expression de douleur sur la tête du  cheval se caractérise par des oreilles rigidement rabattues en arrière, des tensions autour des yeux et au-dessus de la zone des yeux, des muscles de la mastication proéminents, une moue tendue et des naseaux dilatées (Costa et al). Les indicateurs comportementaux du stress seront plutôt des yeux grands ouverts, des secousses de tête, une posture de tête élevée, des tremblements et une queue serrée entre les fesses (Pearson et al). En revanche, la « tête du plaisir » d’un cheval est couramment décrite par des yeux détendus, des lèvres supérieures étendues et des oreilles légèrement repliées en arrière. Cependant, les marqueurs comportementaux et physiologiques des émotions positives discrets chez les chevaux restent peu connus des cavaliers et propriétaires.

Comme il est très compliqué de décrire des expressions faciales, je vous invite à visionner le replay du webinaire sur le sujet. Émilie, comportementaliste, vous explique comment décoder les expressions de votre cheval et à l’accompagner vers un mieux-être.

Reconnaître les signes du cheval : Un problème de connaissances

L’incapacité de l’humain à reconnaître les signes comportementaux de détresse ou le fait de mal les interpréter peut avoir des conséquences sur le bien-être du cheval ainsi que sur la sécurité du cheval et de l’humain. Une étude réalisée par Bell et al. a révélé un écart entre la capacité des experts et celle des répondants novices à reconnaître les affects négatifs chez les chevaux.

Voici comment Bell et ses collègues ont mené l’étude

Ils ont sélectionné 6 vidéos de chevaux au travail montrant des signes de stress ou d’inconfort. Sur la photo ci-dessous, vous pouvez voir le type d’image utilisées.

Ils ont ensuite posté ces vidéos sur des groupes Facebook accompagnées d’un questionnaire afin d’obtenir les réponses de propriétaires et cavaliers. 185 personnes ont pris part à l’analyse. En parallèle, les chercheurs ont également demandé à 6 comportementalistes équins d’analyser ces mêmes vidéos.

Voici les résultats

Lorsqu’on leur a demandé de parler de leur domaine d’expérience avec les chevaux :

  • 137 participants ont affirmé être des propriétaires expérimentés, dont 20 étaient aussi des professionnels de l’industrie équine
  • 8 étaient des anciens propriétaires expérimentés, dont 2 étaient également des professionnels
  • 19 ont été propriétaires pendant moins de 5 ans, dont 2 étaient des professionnels
  • 5 n’étaient pas du tout propriétaires.
  • 16 ont sélectionné uniquement la catégorie « professionnels ».

Parmi les 40 personnes se déclarant professionnelles dans l’industrie équine, 29 étaient instructeurs ou formateurs, certains se qualifiant également de comportementalistes

Participants sur internet :

En réponse à la question sur leur capacité à reconnaître les expressions comportementales de la peur, du stress et de l’anxiété, 75 ont répondu « oui, définitivement », 91 « oui, en partie », 18 « peut-être/parfois » et 1 « probablement pas ».

Les répondants novices étaient plus susceptibles de classer des scénarios de « natural horsemanship » et de monte sans filet comme positifs ; cependant, ils étaient incapables d’identifier les comportements négatifs associés à ces scénarios.

 Les répondants qui ont indiqué qu’ils entraînaient leur cheval principalement en utilisant le renforcement positif (par exemple le clicker) ont montré une meilleure compréhension du comportement. De manière inquiétante, certains répondants ont indiqué qu’ils traiteraient leur propre cheval de manière similaire à l’un des cas proposés dans l’étude, même si la détresse du cheval présenté dans ce cas semblait évidente.

 Les experts

Certains commentaires ont montré une compréhension plus approfondie de la lecture du cheval. En revanche, dans cet article de 2019, nous n’avons pas plus de détail car je cite : « une analyse détaillée de ces réponses qualitatives dépasse le cadre de cet article et feront l’objet de recherches futures ». Toutefois, même les experts n’ont pas pu s’accorder sur le niveau de stress des chevaux en vidéo.

Conclusion

D’après cette étude, il y a pas mal de discordance entre ce que l’on croit savoir et ce que l’on sait réellement lorsqu’il s’agit d’observation et de lecture du cheval. Bien que les comportementalistes équins montrent une plus grande lecture du cheval, ils ne semblent pas tous d’accord quant au niveau de stress des chevaux.

Reconnaître les émotions du cheval : une affaire d’expérience… et d’humains ?

Braun et ses collègues ont évalué la capacité des humains participants à leur étude, à reconnaître les émotions humaines et équines à travers deux tests distincts. Pour commencer, ils ont utilisé une version révisée du test « Reading the Mind in the Eyes » (RMET), dans lequel les participants devaient identifier l’émotion ou l’état d’esprit de personnes à partir de 36 photographies montrant uniquement leurs yeux. Un score élevé indiquait une meilleure reconnaissance des émotions humaines.

Ensuite, les chercheurs ont administré le « Behavior Identification Test » (BIT), composé de 32 photographies de chevaux exprimant différentes émotions (positives, négatives ou neutres). Les participants devaient choisir, parmi huit options, l’état affectif correspondant à la posture du cheval. Deux options servaient de leurres pour éviter les réponses au hasard.

Les résultats ont confirmé deux hypothèses. D’une part, les personnes ayant plus d’expérience avec les chevaux interprétaient plus efficacement leur langage corporel émotionnel. D’autre part, une meilleure reconnaissance des émotions humaines (via le test RMET) était significativement liée à une meilleure lecture des émotions équines.

Ces résultats suggèrent que la capacité à « lire » un cheval dépend à la fois de l’expérience équestre et des compétences générales en reconnaissance émotionnelle. Ils renforcent l’idée que mieux comprendre le comportement émotionnel du cheval passe aussi par le développement de nos propres compétences émotionnelles.

Et si l’intelligence artificielle pouvait nous aider à reconnaitre les expressions faciales ?

Récemment l’ISE (international science of equitation) a partagé une publication avec ce texte que je vous ai traduit :

Traduction :

« Plutôt que d’apprendre aux systèmes informatiques à rechercher des expressions prédéterminées de douleur ou de stress, certains scientifiques donnent simplement à leur IA des images d’animaux dans différentes situations et laissent l’IA repérer les signes révélateurs par elle-même, grâce à un processus appelé apprentissage profond. »

C’est l’approche utilisée par Gabriel Lencioni, vétérinaire et doctorant en comportement et bien-être équin à l’Université de São Paulo.

Dans un travail récent, il a donné à son système d’IA des photos de faciès de chevaux avant et après une chirurgie, puis avant et après l’administration de leurs analgésiques régulièrement planifiés, demandant à la machine de se concentrer spécifiquement sur les différences au niveau des oreilles, des yeux et de la bouche. Après avoir été formée sur 3000 images, « l’IA a appris d’elle-même », dit-il ; au final, elle a été capable de diagnostiquer correctement si un animal était en douleur 88 % du temps. »

Andersen et sa collègue Broomé chercheuse en vision par ordinateur maintenant à Sleip AI, ont développé un outil similaire, mais formé à partir de vidéos de chevaux, plutôt que d’images. Lors des tests, l’IA a non seulement reconnu des signes de douleur que les vétérinaires avaient manqués, mais elle a aussi correctement déclaré que des animaux étaient sans douleur, alors que des experts pensaient qu’ils souffraient. »

Mon questionnement

Alors bien sûr, comme nous l’avons vu plus haut, l’humain lui-même n’est pas toujours capable de repérer les signaux du cheval, donc il faudrait voir combien de personne ont jugé l’IA pour arriver à ces 88% et qui de l’IA ou des experts a raison sur le fait qu’un cheval souffre.

L’intelligence artificielle, dans le futur, pourrait donc devenir une aide précieuse aux propriétaires et aux professionnels. Imaginez,  que vous ayez un doute et que vous n’ayez besoin que de sortir votre téléphone, prendre une photo et hop là, vous savez comment se sent votre cheval !! Ce serait génial ! Bon et en même temps, le revers pourrait être que l’on observe de moins en moins les chevaux et que le jour où nous n’avons pas de téléphone nous soyons complètement perdus. Mais cela pourrait également nous permettre d’en profiter pour apprendre à mieux identifier les signaux et être tout de même plus performant dans notre analyse. 

L’IA pourrait aussi permettre de détecter des micro-signaux et notamment la résignation acquise de la part du cheval. Nous ne parlons pas assez de ce phénomène bien plus courant qu’on ne le pense, alors c’est parti.

La résignation acquise

Vous avez peut-être déjà entendu ce terme, mais savez-vous vraiment de quoi il s’agit et comment reconnaitre un cheval en résignation acquise ?

Les indicateurs comportementaux de stress, tels que le cabrage, les départs brusques, les coups de pied ou les morsures, sont souvent évidents pour ceux qui sont en contact avec des chevaux. Cependant, même en l’absence de tels signes, cela ne signifie pas qu’il n’y a pas de détresse chez le cheval.

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